Cat. 31
Plume, encre brune, lavis brun, rehauts de blanc de céruse oxydés, mise au carreau à la pierre noire, papier vergé
H. 20,4 cm ; L. 27,8 cm
Le cycle funéraire d’Henri IV à Florence en 1610
Second épisode de la suite raisonnée de scènes biographiques faisant suite à la mort d’Henri IV exposées à Florence le 16 septembre 1610 pour le service funèbre organisé par les Médicis, la présente composition décrit la magnanimité du roi de Navarre à l’égard de ses prisonniers, à l’issue de la victoire remportée à Coutras le 20 octobre 1587. Le format de ce probable état préparatoire, la manière pleinement italienne de cette œuvre dont l’iconographie paraît avoir été traitée avec beaucoup de soin renforcent le sentiment de liens très forts intéressant la cour florentine à la geste henricienne. À quelques variantes près, l’eau-forte placée à la page 20 de l’ouvrage de Giraldi – numérotée 2 – (fig. 31 a) lui correspond précisément : QUORUM VIRTUTI COUTRASIACAE PUGNAE FORTUNA / PEPERCIT, EORUM LIBERTATI PARCIT HENRICUS / NIHIL EX VICTIS PRAETER GLORIAM SUMENS.
Le commentaire emphatique des Florentins évoque la noblesse et la générosité de ce vainqueur magnanime, qui libère ses prisonniers catholiques (il est alors protestant et commande les armées de ce parti) sans exiger de rançon, s’inquiète des blessés et laisse paraître son émotion à la mort du duc de Joyeuse et de son frère, Saint-Sauveur, blessé à mort au combat. Cette idéalisation repose bien sur un fait avéré : la bataille de Coutras fut une hécatombe pour la noblesse catholique (près de deux mille morts dans les rangs de l’armée royale, fort peu chez les huguenots), et Henri éprouva une sincère compassion « de classe1 », faisant soigner les blessés, les libérant, parfois sans rançon, à l’issue de sa première grande victoire. « Il me fâche fort du sang qui se répand », écrira-t-il au maréchal de Matignon : « mais pour le moins, ajoute-t-il, ceux qui sont restés en mes mains témoigneront la courtoisie qu’ils ont trouvée en moi et en mes serviteurs qui les ont pris2 ».
La peinture originale correspondant au présent dessin, la deuxième du cycle, reste à ce jour donnée pour perdue. Elle partage ce sort avec huit autres pièces. Si, par ailleurs, un certain nombre des dessins relatifs à des scènes majeures ont pu faire l’objet de plusieurs versions dérivées, celle illustrant la clémence du roi à l’issue de la bataille de Coutras n’était connue à ce jour que par la gravure de Rosaccio, puisque aucun dessin ne semble conservé dans les fonds florentins3. En revanche, les nombreux exemplaires du livret de Giraldi, qui pouvait d’ailleurs remplir la fonction d’un véritable album biographique en résumé, donnèrent une dimension nouvelle à cette décoration circonstancielle, à l’heure où le gouvernement de la régente favorisait la parution du recueil des oraisons funèbres d’Henri IV par les soins de Guillaume Du Peyrat (1611).
Notes
Auteurs : P. Mironneau, Cl. Menges
© Réunion des musées nationaux – 2007
Zoom navigable
FIG. 31 a
Alovisio Rosaccio
Clémence d’Henri de Navarre à l’issue de la bataille de Coutras
Eau-forte
Giraldi 1610, p. 20
Pau, musée national du Château, BP 221